Une église comme un grand parapluie

Si vous interrogez des personnes sur les concepts de l’Église anglicane, vous obtiendrez les réponses les plus diverses. Les uns appellent les anglicans « des catholiques, mais sans le pape », d’autres pensent que cette Église est un courant au sein du protestantisme. Qu’en est-il ? Nous avons posé la question à Annie Bolger, prêtre de l’Église d’Angleterre à Bruxelles.

En entrant dans la Holy Trinity Church, l’église de la Sainte Trinité, cachée rue
Capitaine Crespel, une petite rue calme donnant sur l’avenue de la Toison d’Or à Ixelles,
j’avais l’impression de me trouver en terrain connu. Des bancs en bois, un crucifix, un autel, un lutrin, l’orgue et à l’entrée un bénitier : des objets « classiques » qu’on peut trouver dans chaque église catholique. J’y ai rencontré l’un des prêtres de cette église anglophone.

Une dame au sourire sympathique s’approche de moi. Elle porte un col romain blanc, ce qui est très inhabituel aux yeux des catholiques romains. À cet instant je suis frappé par cette différence entre notre Église et l’Église d’Angleterre, comme on appelle aussi l’Église anglicane. La révérende Annie Bolger a suivi une formation de prêtre en
Angleterre et a été ordonnée diacre en 2020. Un an plus tard, elle fut ordonnée prêtre et travaille depuis lors dans notre capitale.

« En fait, je suis américaine, dit-elle. Après mon mariage, je suis venue en Belgique pour étudier la théologie. En tant qu’étudiante, j’étais pratiquante à Saint Martha & Saint Mary’s (Sainte Marthe et sainte Marie), la paroisse anglicane de Louvain. Dans cette communauté, je me suis posé la question de ma vocation et j’ai opté pour
la prêtrise. »

Une voie intermédiaire
Le dimanche, les célébrations à Holy Trinity – en anglais ou bilingue anglais/français –
comptent globalement quatre cents fidèles. Ce n’est pas rien. Cependant, l’Église anglicane de la « mère patrie » est confrontée aux mêmes défis que l’Église chez nous : en Angleterre aussi, il y a beaucoup de bancs vides dans l’église le dimanche et les jeunes y brillent par leur absence. Ce n’est donc pas le cas à Bruxelles – et cela
s’explique.

La diversité est grande, il y a un mixité, des non-anglicans venant aussi partager notre célébration.

Reverend Annie Bolger

« Notre église est principalement fréquentée par des expatriés, des étrangers qui vivent à Bruxelles et travaillent pour les institutions européennes, l’OTAN ou d’autres grandes organisations », explique Annie Bolger. « Ce sont souvent des familles ‘mixtes’ : des couples chrétiens dont les maris sont issus de foyers protestants et dont les épouses sont plus proches du catholicisme, ou vice versa. Ils trouvent dans notre église une voie
intermédiaire entre les traditions catholique et protestante. Un avantage supplémentaire est le fait que son public est international et que nos célébrations se font en anglais. »

Un grand parapluie
Un compromis entre protestants et catholiques : voilà peut-être la meilleure façon de résumer l’anglicanisme en quelques mots. « Je compare souvent notre Église à un grand parapluie », dit Annie. « Il y a beaucoup de gens qui se cachent en dessous, même s’ils ne sont pas d’accord sur beaucoup de terrains. La diversité est grande. Certes, notre communauté ecclésiale à Bruxelles ne peut pas être cataloguée, il y a une mixité, des non-anglicans venant aussi partager notre célébration. »

Cette diversité se reflète également dans la liturgie, explique-t-elle : « Si vous entrez dans une église paroissiale en Angleterre le dimanche, il y a de fortes chances que la célébration soit plutôt austère – on dirait davantage protestante.
En outre, il y a la dite Haute Église, dont les rituels sont sûrement familiers aux Belges catholiques. Il suffit de penser à la prière du chapelet et l’Angélus. De plus, pour une petite minorité, la dévotion mariale a aussi sa place. »


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Marie dans la gloire de Dieu

Le 15 aout, notre Église célèbre l’Assomption de Marie. Une bonne occasion de méditer les racines de ce dogme et de se plonger dans les textes de la liturgie de cette solennité mariale.

Le 15 août, les chrétiens catholiques et orthodoxes fêtent la bienheureuse Vierge Marie. Pour les catholiques, la fête est appelée « Assomption » et pour les orthodoxes « Dormition. » Cette fête remonte à un texte apocryphe, le Transitus Mariae du cinquième siècle. Les apocryphes sont des textes que l’Église n’a pas reconnus comme canoniques et qu’on ne trouve donc pas dans la Bible.

ASSOMPTION OU DORMITION ?

Pour les catholiques, l’Assomption commémore la gloire de Marie avec Dieu : elle est enlevée de la vie sur la terre pour entrer dans la vie en Dieu, après avoir participé à la vie de Jésus. Sa vie a été toute donnée à la volonté de Dieu. Promulguée le premier novembre 1950 par le pape Pie XII, le dogme de l’Assomption est lié à celui de l’Immaculée Conception, ce que les orthodoxes refusent. Marie est élevée aux cieux, assumée corps et âme en Dieu : c’est le couronnement de la vocation de Marie dans le plan de Dieu.

Pour les orthodoxes, la Dormition est l’endormissement de Marie dans la mort. À Jérusalem, l’abbaye de la Dormition est un monastère de moines bénédictins qui se trouve sur le mont Sion. Elle a été construite par les moines allemands de Beuron de 1900 à 1910. Source d’espérance de la vie éternelle promise après la mort, la fête de l’Assomption de la bienheureuse Vierge Marie est célébrée dans tous les lieux d’apparition de Marie dans le monde.

UNE SIGNE GRANDIOSE…

Après cette approche historique, mettons-nous à l’écoute des textes de la liturgie du 15 aout. Tout d’abord la belle description de Marie dans l’Apocalypse de saint Jean : « Un signe grandiose apparut dans le ciel : une femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds et, sur la tête, une couronne de douze étoiles » (Ap 12, 1).

Oui, Seigneur, tu as élevé jusqu’à la gloire du ciel, dans son âme et son corps, Marie, la Vierge immaculée, la Mère de ton Fils ; fais que, toujours tendus vers les réalités d’en haut, nous obtenions de partager sa gloire. Et l’évangile proposé en ce jour de fête, est celui de la visite de Marie à sa cousine Elisabeth avec la belle prière du Magnificat, chantée chaque jour dans toutes les abbayes pendant les vêpres. N’est-ce pas un appel pour tous les baptisés à la prier régulièrement ?

« Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur ! Il s’est penché sur son humble servante. Désormais tous les âges me diront bienheureuse. Le Puissant fit pour moi des merveilles. Saint est son Nom. »

Allemagne – Lors de la procession mariale du 15 aout, une équipe de 16 hommes fait trôner la statue de la Vierge à travers les rues de la ville de Bamberg

UNE LITANIE POUR MARIE

Et pour conclure, je propose encore de prier de manière toute simple, sous forme de litanie. Rendons grâce à Dieu notre Père, par Marie il a fait des merveilles :

« Marie, servante du Seigneur, intercède pour nous tes enfants. Marie, bénie entre toutes les femmes ; Marie, sourire de Dieu ; Marie, modèle de foi ; Marie, mère fidèle ; Marie, source de notre joie ; Marie, tendresse des pauvres ; Marie, étoile de ceux qui cherchent ; Marie, mère au cœur transpercé ; Marie, force de ceux qui peinent ; Marie, espoir de ceux qui meurent ; Marie, docile au souffle de l’Esprit. 

Salut, Reine des cieux ! Salut, Reine des anges ! Salut, Tige féconde ! Salut, Porte du ciel ! Par toi, la lumière s’est levée sur le monde. Réjouis-toi, Vierge glorieuse, belle entre toutes les femmes ! Salut, splendeur radieuse : implore ton Fils Jésus pour nous. »

Marie a triomphé de la mort et elle a été glorifiée dans le ciel, à l’exemple de son Fils unique Jésus Christ.

Pie XII

La fête de l’Assomption de la bienheureuse Vierge Marie est une très belle fête : nous qui vivons sur la terre, nous tournons notre regard vers le ciel où le Père des miséricordes nous attend avec toute la cour céleste. Et une semaine plus tard, le 22 août, nous fêtons Marie Reine, la Reine sur le cœur de Dieu, la Reine du monde et de nos cœurs reconnaissants : « Salut, ô Reine de miséricorde ! Notre vie, notre douceur, notre espérance, salut ! »

Nancy de Montpellier

Séjourner dans un monastère : cinq conseils

Passer quelques jours de détente dans un monastère ou une abbaye : cela peut sembler merveilleux ! Mais est-ce vraiment quelque chose pour moi, nous direz-vous ? Rassurez-vous, l’hospitalité est inscrite dans l’ADN des moines. Cependant, il est préférable de connaître certaines règles en vigueur dans ces lieux avant de frapper à la porte de l’hôtellerie. Dans cet article, nous vous donnons quelques conseils.

Les monastères se trouvent souvent dans des environnements magnifiques, comme ici l’abbaye des prémontrés à Juaye-Mondaye, en Normandie.

UN COUVENT N’EST PAS UN HÔTEL

Quiconque descend par une journée ensoleillée à Postel, à la frontière belgo-néerlandaise, sait qu’il peut y avoir beaucoup de monde. L’endroit est un peu caché dans les bois et on passe facilement sans le voir. Néanmoins, des hordes de touristes se rendent dans les nombreuses friteries, salons de thé et restaurants situés à proximité immédiate de l’abbaye des prémontrés. Les sportifs se retrouvent à la porte du monastère pour une balade à vélo ou une marche. Postel n’est pas un cas unique. Les monastères et les abbayes, aussi isolés soient-ils, sont très souvent des attractions touristiques. Passer quelques jours dans un environnement aussi beau devient alors très tentant. Cependant, l’hôtellerie d’un monastère ou d’une abbaye n’est pas un hôtel. Cela se remarque immédiatement dans les chambres. Elles sont généralement très sobres : un lit, un lavabo, une armoire, une table et une chaise. Il n’est pas rare que les douches et les toilettes se trouvent dans le couloir. Si vous aimez d’être servis au doigt et à l’œil, séjourner dans une abbaye vous décevra. Parfois il est demandé aux hôtes de donner un coup de main pour faire la vaisselle et dresser la table.

AU RYTHME DES MOINES

Au couvent, on vit au rythme des religieux. Autrement dit : « Quand on est à Rome, on fait comme les Romains. » La régularité de la vie monastique se retrouve dans les quartiers des hôtes. Par exemple, les repas sont pris à heure fixe. Les frères et sœurs apprécient que vous assistiez au moins à certains offices de prière (voire à toutes). Les pères trappistes de Chimay fermeront probablement les yeux si vous ne vous présentez pas aux vigiles à quatre heures du matin… Le respect du mode de vie des moines va de soi. La discrétion est de mise, surtout lorsqu’on est invité dans une communauté contemplative. Certains moines ou moniales (des sœurs contemplatives) aiment bien bavarder… mais n’insistez pas. Il en va de même pour les autres invités.

N’AYEZ PAS PEUR DU SILENCE

Autant il peut y avoir du bruit à l’extérieur des murs du monastère, autant c’est calme dans les quartiers des hôtes. Pour garder le calme – les chambres, souvent situées dans des bâtiments anciens, sont assez mal insonorisées – il est préférable d’éteindre son téléphone portable. Passez vos appels à l’extérieur ou dans une pièce prévue à cet effet. De même, il est déconseillé d’avoir des conversations dans les couloirs, tout au plus aux chuchotements. Quelques jours de silence : pour la plupart des gens, cela semble formidable. Néanmoins, un séjour dans une abbaye peut être assez éprouvant. N’oubliez pas que dans certaines maisons, même les repas se déroulent en silence, avec ou sans musique classique en fond sonore. À Orval, par exemple, même dans le jardin des hôtes, les gens parlent à voix basse. Toutefois, des occasions ne manquent pas pour sortir du silence. En tant qu’hôte à Orval ou à Maredsous, pourquoi ne pas s’aventurer dans les bois ? Dans la plupart des résidences monastiques, vous pouvez vous rendre dans une salle de détente pour prendre un café et bavarder. J’ai séjourné une fois dans un monastère où, le soir, le père hôtelier nous a offert une délicieuse bière trappiste…

QUESTION CENTRALE : CELA ME CONVIENT-IL ?

Lors de votre première visite, un père ou une sœur se fera un plaisir de vous guider dans le dédale des couloirs et des portes. Mais en réalité, il faut se débrouiller. On s’en aperçoit parfois même avant d’arriver à destination : les visiteurs d’une abbaye, se fiant à leur GPS, se retrouvent parfois littéralement dans une impasse… Dans un hôtel, vous pourriez vous adresser à la réception 24 heures sur 24, mais dans les petits monastères, il est tout à fait possible que le père hôtelier rende également visite aux malades dans les villages, fasse lui-même des courses ou soit chauffeur pour des frères âgés. Un dépliant sur les modalités pratiques, qui se trouve dans votre chambre, peut vous aider. Si vous souhaitez séjourner dans un monastère pendant un certain temps, il est préférable de vous demander au préalable si cela vous convient. J’ai déjà indiqué qu’un tel endroit n’est pas un hôtel. Il arrive aussi que des personnes veuillent échapper au brouhaha du quotidien ou mettre de l’ordre dans leur vie. Ils font alors escale dans une abbaye. Si vous vous sentez mal dans votre peau, rester dans un isolement relatif n’est pas toujours une bonne solution. Il est, bien sûr, possible de demander un entretien avec une sœur ou un prêtre, mais les moines ne sont généralement pas formés pour conseiller les personnes ayant des problèmes psychologiques.

Orval (province de Luxembourg): les ruines de l’ancienne abbaye et la façade de la nouvelle église

OUVREZ YEUX ET OREILLES

Quelle que soit l’hospitalité des moines, des pères, des frères et des sœurs, certaines portes resteront toujours fermées aux visiteurs. Dans n’importe quel monastère, vous rencontrerez régulièrement des panneaux indiquant « cloître » ou « claustrum ». Derrière ces panneaux se trouvent les quartiers privés des résidents. Le fait que vous ne soyez pas autorisé à y entrer est une question de respect d’intimité. Pour le reste, il s’agit de garder les yeux et les oreilles ouverts. Chaque monastère a son propre charme. À Tongerlo, c’est l’ancienne allée de tilleuls – la plus ancienne de l’Europe ? – qui vous mène, tel un tapis rouge, à la porte du monastère. À Averbode, l’opulente église abbatiale sert de cadre aux vêpres grégoriennes, tandis que les moines de Chevetogne plongent leurs hôtes dans la liturgie byzantine (avec beaucoup d’encens !). Au travers les différents styles, de la splendeur baroque jusqu’à une très grande sobriété, le chemin de la quête de Dieu a produit dans nos régions une beauté qui ne laissera personne indifférent.

Glenn Geeraerts

brown mountains

Dans les pas de Damien

Il y a un siècle et demi, le 10 mai 1873, le père s’est rendu pour la première fois à Molokai. Pour beaucoup, le prêtre missionnaire Belge est un héros. Mais qui était vraiment Damien ? Et comment pouvons-nous cheminer avec lui aujourd’hui ? Nous avons demandé à l’historien Ruben Boon, qui travaille au Musée Damien à Tremelo, de nous éclairer.

Le père Damien a vécu il y a deux siècles. Pourtant, il continue d’inspirer les gens du monde entier aujourd’hui. Damien, le héros et saint est largement connu et célèbre. Cependant, selon ses amis et connaissances, il était très modeste et ne montrait aucune allure de star. Si nous voulons vraiment découvrir comment Damien peut encore nous inspirer et marcher avec nous aujourd’hui, nous devons apprendre à mieux connaître Damien en tant que personne. Au fil des ans, la vision de ce Damien ‘humain’ a été assombrie par l’image dominante que nous avons de lui : un héros et un saint. Quand on écoute Damien et surtout les voix de tous ceux qui ont vécu et travaillé avec lui, on rencontre une personne spéciale. Allons dans les pas de Damien…

PRIER ET TRAVAILLER


Statue de Damien dans la basilique Notre-Dame de Montaigu

Nous commençons à Ninde, hameau de Tremelo (entre Louvain et Aerschot). Damien, alias Jozef (Jef) De Veuster, y est né le 3 janvier 1840, benjamin d’une famille de huit enfants. Le père et la mère De Veuster avaient une ferme et un commerce de céréales. La famille était aisée et n’avait pas à souffrir de la faim. Mère De Veuster lisait régulièrement la vie des saints et transmettait à ses enfants la foi catholique, avec toutes les dévotions. Elle leur a montré qu’il faut aider les personnes en détresse. À cette époque, les mendiants venaient régulièrement à la porte. Maman était là pour eux. Prier et travailler, c’était le plus important. Ce travail renvoyait au labeur de la terre ou au commerce des céréales, mais certainement aussi aux « bonnes oeuvres ».

Jef a vu deux soeurs et un frère choisir une vie religieuse. Il est resté à la maison après l’école primaire pour aider à la ferme. Le jour de Noël 1858, il convainquit ses parents qu’il ne pouvait reprendre l’exploitation agricole et céréalière, car Dieu l’appelait à un autre « travail ». Il voulait suivre son frère et ses deux soeurs.

MISSIONNAIRE ET PRÊTRE

À 19 ans, Jef rejoint les pères des Sacrés-Coeurs à Louvain, tout comme son frère. Il a reçu un nouveau nom : Damien. Son frère avait été désigné pour aller à Hawaï en tant que missionnaire, mais tomba malade et Damien fut autorisé à le remplacer.

Le 19 mars 1864, il arrive dans les îles hawaïennes. Après un cours accéléré d’hawaïen et son ordination à Honolulu, l’évêque l’envoya dans la zone de mission sur l’île d’Hawaï. Damien y fit tout ce qu’un prêtre missionnaire faisait à cette époque : baptiser, catéchiser, célébrer l’eucharistie, organiser des processions, construire des chapelles, etc. Son district de mission était très vaste, mais il faisait tout ce qu’il pouvait pour être proche des gens et les visiter. Il a mangé avec eux, a écouté leurs histoires, a partagé leurs joies et leurs peines.

CHEZ LES LÉPREUX

Ainsi, il a vu comment la lèpre et la politique d’isolement du gouvernement ont fait de nombreuses victimes et laissé de profondes blessures dans la société hawaïenne. Il voulait aider mais se sentait impuissant. Au fil des ans, de solides amitiés s’étaient nouées entre Damien et ses paroissiens hawaïens. Les gens lui ont demandé de l’aide. On aide les gens dans le besoin, c’est ce qu’il avait appris.

Il s’est porté volontaire auprès de l’évêque pour aider dans la colonie de lépreux de Molokai, où toutes les personnes atteintes de la lèpre étaient séquestrées, séparées de façon permanente de leurs familles et amis. Il y arriva le 10 mai 1873 et y resta près de seize ans jusqu’à sa mort le 15 avril 1889.

Des représentants du gouvernement dirigeaient la colonie. Damien était en fait là pour aider les catholiques. Cependant, selon son habitude, il alla rendre visite à tout le monde. Il a surmonté sa peur de la contamination, a mangé dans le même bol, soignait les blessures… Il s’est rendu compte qu’il ne pouvait pas parler et prêcher au sujet d’un « Dieu qui est amour » alors que les gens mouraient de faim et de privation. Ce fut encore une question de prière et de travail.

OHANA, MALAMA, ALOHA

À partir de sa foi et de sa mission, Damien, à Molokai, a mis ses talents au service de tous, sans distinction. Il n’a pas seulement fait cela en relation avec de nombreuses personnes, il s’est associé aux résidents de la colonie de lépreux. Ensemble, ils ont tout fait pour améliorer la qualité de vie : un meilleur logement, suffisamment de nourriture et de boisson, des vêtements convenables, des soins médicaux, du jeu et du temps libre…

Damien n’était pas le seul ‘héros’ de la colonie de lépreux. Il y avait aussi de nombreux autres héros hawaïens. Damien se sentait comme l’un d’entre eux. Il a été accepté et approuvé par les Hawaïens (malades) en tant que missionnaire blanc parce qu’il parlait leur langue et pratiquait trois valeurs hawaïennes de base. Dans les liens familiaux qu’il entretenait avec chacun, les Hawaïens voyaient leur valeur d’ohana (famille). Dans l’attention et le respect qu’il portait à chacun, les Hawaïens reconnaissaient la malama (attention). Dans son amour et sa solidarité radicales qui surmontent la peur de la contamination, les Hawaïens ont vu l’aloha (amour).

POUR TOUT LE MONDE

C’est justement là que réside l’actualité et l’inspiration permanente de Damien. Il était humain dans l’âme. Il avait sa personnalité, son caractère, ses croyances, ses préjugés, ses talents et ses défauts. Cependant, il ne s’est pas laissé enfermer en lui-même. La rencontre de ses semblables en Europe et surtout à Hawaï l’a profondément changé. Il s’est laissé toucher par les personnes en détresse. Il savait de par son éducation (religieuse) ce qu’il devait faire : la prière et les bonnes oeuvres. Inspirez-vous, prenez soin de vous pour travailler ainsi et prenez soin des autres. Sur la base de sa foi et de sa mission, il a utilisé ses talents pour tout le monde, sans distinction de religion ou de culture. Les valeurs hawaïennes d’appartenance, d’attention, de respect, d’amour et de solidarité étaient au coeur de sa vie. Ce sont des valeurs universelles qui restent actuelles.

Après cette rencontre avec Damien, sommes-nous prêts aujourd’hui à marcher dans ses pas et à incarner ces valeurs dans notre monde d’aujourd’hui ?

Ruben Boon
info@damiaanvandaag.be

Visitez également le musée Damien à Tremelo.
Plus d’infos : damiaanmuseum.be/fr

Cet article est paru dans l’édition de mai-juin de notre revue Marie, médiatrice et reine. Vous voulez lire plus? Prenez un abonnement d’essai gratuit!

rosary on top of opened bible book

Quand une adulte se fait baptiser

Nous faisons tous le compte à rebours jusqu’à Pâques, mais cette année, pour Camille, c’est plutôt excitant. La nuit de Pâques, elle recevra le baptême dans la cathédrale de Bruges : « Je me sens déjà chrétienne et bientôt je le deviendrai vraiment. »

Pour Camille Misiaszek, 2023 sera une année mémorable. En aout, elle épousera Maxime, avec qui elle vit à Izegem. Mais le samedi 8 avril également est marqué dans son agenda. Au cours la veillée pascale, elle sera baptisée avec six autres adultes – tous âgés de moins de cinquante ans – par l’évêque de Bruges. De plus, Camille se lance dans l’apprentissage du néerlandais, car c’est l’amour qui a conduit la Française de 26 ans en Flandre occidentale. « Quant au dialecte de la région, je ne suis nulle part. »

Mmr : On entend de plus en plus parler d’adultes qui demandent d’être rayés du registre des baptêmes. Vous choisissez l’autre voie et vous serez baptisée comme jeune adulte. Comment en êtes-vous arrivée à ce choix ?
Camille : « Vous pensez peut-être que je viens d’une famille non-croyante, mais ce n’est pas le cas. Du côté de mon père, j’ai des racines polonaises, donc j’ai certainement gardé quelque chose de la tradition catholique. J’ai aussi fréquenté une école catholique. Mais mes parents n’étaient pas vraiment des croyants pratiquants. Enfant, je n’ai pas été baptisée. Maintenant que j’ai des projets de mariage, j’ai pensé que le moment était venu d’opter pour le baptême. Dans ce cas je confirme officiellement celle que je suis ;
je me sens chrétienne, et à partir du baptême je le serai vraiment. »

Mmr : Que signifie croire, pour vous ?
Camille :
« Je crois qu’il y a quelqu’un qui a beaucoup plus de connaissances du monde que moi. Quelqu’un qui semble souvent être invisible, mais qui est toujours présent dans les petits moments de bonheur de la vie quotidienne, mais aussi quand les choses vont mal. Ma foi me pousse à réfléchir. Vivre ensemble qu’est-ce que cela signifie pour moi ? Comment vivre ma relation avec mes amis et ma famille ? Que se passe-t-il, qu’est-ce que je suis en train de vivre ? Je pose ce genre de questions en tant que croyante. »
« Je ne suis peut-être pas une pratiquante exemplaire, mais j’essaie quand même de mettre ma foi en pratique. Par exemple, j’ai récemment eu une conversation avec ma catéchiste sur la réconciliation et le pardon. On peut faire de belles théories à ce sujet, mais le défi c’est de vivre la réconciliation dans la vie quotidienne. Parfois, il est très difficile de pardonner à quelqu’un avec qui je viens d’avoir une dispute fracassante. »

Camille entourée de son fiancé Maxime, de la catéchiste Magda et de Mgr Lode Aerts. Photo: Nathalie Verstraete

Mmr : L’année dernière, vous avez fait les premiers pas en tant que ‘catéchumène’, comme on appelle les candidat(e)s au baptême. Comment s’est passée cette étape ?
Camille :
« Nous avons été invités à Bruges, où j’ai découvert qu’il y avait plusieurs adultes demandant le baptême. Cela m’a agréablement surprise. J’avais pensé que nous serions trois ou quatre tout au plus. Puis ils sont plutôt jeunes, ce qui m’a rassurée. Après tout, il s’agit de jeunes adultes qui ont opté pour l’Église. »
« Depuis septembre, je suis la catéchèse avec Magda, je la rencontre au moins une fois par mois. Chaque fois, nous traitons un thème ou une histoire biblique, comme par exemple la rencontre de Jésus et de Zachée. La catéchiste me demande alors ce qui me vient à l’esprit en lisant le récit. Les textes évangéliques sont très enrichissants ; l’Ancien Testament est parfois assez dur. »

Mmr : Sur votre chemin de foi, il est clair que vous n’êtes pas seule.
Camille :
« Ce n’est pas toujours facile, en partie parce que le néerlandais n’est pas ma langue maternelle. Mais Magda a une patience angélique ! De plus, souvent mon fiancé et ma belle-mère m’accompagnent quand je me rends à la catéchèse. Même la grand-mère de Maxime aime y participer. Ils se sentent très impliqués dans les cours. Lorsque nous parlons d’un thème de notre foi, je découvre parfois les interprétations de trois générations. Bien sûr, ces opinions ou points de vue différents alimentent la conversation. »
« La date de mon baptême est maintenant très proche et le mariage est encore une question de mois. Il y a de quoi m’occuper. Mais en même temps, j’ai vraiment hâte d’y arriver : ce sont deux moments clés du parcours de ma vie. »

Interview réalisée par Glenn Geeraerts

Cet article est paru dans l’édition d’avril de notre revue Marie, médiatrice et reine. Vous voulez lire plus? Prenez un abonnement d’essai gratuit!

body of water at daytime

La patience infinie de Dieu

Le pape François nous parle du mystère de la patience de Dieu. « Du premier moment de la création, le Seigneur est engagé avec nous » dit-il. « Dieu prend son temps, mais Lui aussi a une grande patience. Il nous attend. »

Il n’existe pas un protocole de l’action de Dieu sur notre vie, commence le pape, mais nous pouvons être certains qu’un jour ou l’autre, Il intervient à sa manière. Pour cela, nous ne devons pas nous laisser gagner par l’impatience, le découragement ou par le scepticisme. Dieu marche toujours avec nous, et cela est certain. »

« Du premier moment de la création, Dieu est engagé avec nous. Il n’a pas créé le monde, l’homme, la femme et Il les a laissés. Il nous a créés à son image et ressemblance. Donc, dès le commencement des temps, on trouve cette implication du Seigneur dans notre vie, dans la vie de son peuple, parce que le Seigneur est proche de son peuple, très proche. Il le dit Lui-même : quel peuple sur la terre comme vous a un Dieu aussi proche ? »

UN SIGNE D’AMOUR

« Cette proximité du Seigneur, poursuit le pape François, est un signe de son amour ; Il nous aime tant qu’Il a voulu cheminer avec nous. La vie est un chemin qu’Il a voulu faire avec nous. Le Seigneur entre toujours dans notre vie et nous aide à aller de l’avant. Mais, quand Il vient, Il ne le fait pas toujours de la même manière. Il n’existe pas un protocole de l’action de Dieu sur notre vie. Un jour, Il le fait d’une manière, un autre jour, Il le fait d’une autre. Mais Il le fait toujours. Il y a toujours cette rencontre entre nous et le Seigneur. »

« Le Seigneur prend son temps, mais Lui aussi dans ce rapport avec nous, a une grande patience » explique le pape. « Nous ne sommes pas les seuls à devoir être patients. Lui a la patience, Lui nous attend. Et Il nous attend jusqu’à la fin de la vie, avec le bon larron qui juste à la fin a reconnu Dieu. Le Seigneur marche avec nous, mais très souvent, Il ne se fait pas voir, comme dans le cas des disciples d’Emmaüs. Le Seigneur intervient, mais nous devons attendre, attendre le moment en marchant toujours en sa présence. »

« TOUT, TOUT DE SUITE ! »

Oui, me direz-vous, le pape François dit vrai, mais nous sommes pris par le temps et les obligations. Aah ! Ce fameux temps… On écrirait presque ce mot ‘temps’ avec une majuscule, tant il est devenu le maître de nos jours.

À son époque, Jésus a raconté des paraboles exhortant à la patience. Telles celles du semeur, du figuier desséché… toutes ont un point commun : elles sont un appel à la patience. À l’aide de tous ces personnages, Jésus veut nous faire comprendre que son Père prend patience avec les hommes.
Tandis que nous vivons dans une société qui nous habitue au : « Tout, tout de suite », l’Esprit de la Parole de Dieu nous invite à la persévérance dans nos engagements. Il nous encourage à la patience envers nous-mêmes, et envers les autres, comme Dieu est patient avec nous tous. Tout va tellement vite aujourd’hui qu’on n’a plus de temps pour Dieu, ou pour nous retrouver en Communauté. C’est vrai qu’il y a sans cesse tant de chose à faire ! Comment nous arrêter pour jeter un oeil sur notre vie, pour méditer avec Dieu, Lui parler, L’écouter.

Lorsque nous sommes patients, nous répondons à la patience de Dieu envers nous et l’humanité

LAISSER LE TEMPS AU TEMPS

Une perte de temps que cela ? Non, ces moments de prière, de méditation, de partage fraternel, sont des moments privilégiés. Faire une pause dans la semaine agitée est un ressourcement. On met de côté tout ce qui appelle à l’efficacité et à la rentabilité.

Les paraboles de Jésus remettent les choses à leur place et ‘laissent le temps au temps’. Lorsque nous sommes patients, nous répondons à la patience de Dieu envers nous et l’humanité. Le Seigneur est toujours là, Il est notre semeur en train d’attendre que ses semences de justice et de vérité poussent dans nos coeurs.

L’HUMILITÉ DU GRAIN DE MOUTARDE

La graine de l’amour a-t-elle germé dans notre coeur ? Commençons par nous asseoir, nous reposer, mûrir en nous l’oeuvre de Dieu. Cessons de nous agiter à vouloir faire tout nous-mêmes et très vite. Nous n’avons finalement que si peu à offrir… nous sommes chacun une si petite goutte dans l’océan infini. Cherchons à plaire à Dieu au moins autant qu’aux hommes !

Émerveillons-nous devant ce petit grain de moutarde qui devient un arbre sans avoir rien à faire en particulier. C’est le mystère de la patience de la nature. Nous non plus n’avons rien à faire pour plaire à Dieu. C’est le mystère de la Parole semée en nous, et même si aujourd’hui, nous sommes insatisfaits de notre ferveur, nous sommes grands dans le coeur de Dieu.

Acceptons notre petitesse de grain de moutarde. Tout ce que nous faisons ne doit pas pour autant être grandiose. Nous avons été semés pour pousser et incarner le Royaume de Dieu, ‘sans tambours ni trompettes’, humblement, discrètement. C’est dans les moments de partage et de fraternité que ce Royaume pousse et grandit.
Que Dieu nous aide à avoir de la patience et de la confiance en Lui.

Florence Paul

Cet article est paru dans l’édition de mars de notre revue Marie, médiatrice et reine. Vous voulez lire plus? Prenez un abonnement d’essai gratuit!

Pourquoi les gens vont-ils en pèlerinage ?

Pourquoi les gens partent-ils en pèlerinage ? Pourquoi choisissent-ils de quitter leur « zone de confort » et de se rendre dans un sanctuaire chez nous ou à l’étranger ?

Un passage du Nouveau Testament qui me tient à cœur est celui des pèlerins d’Emmaüs (Lc 24, 13-35). Dans ce dernier chapitre de l’Évangile de Luc, nous rencontrons deux disciples de Jésus. Ils ont célébré la Pâque à Jérusalem et ils parlent de ce qui s’est passé : l’épreuve injuste de Jésus, sa mort horrible, le tombeau vide… Jésus marche avec eux depuis peu en direction d’Emmaüs, sans qu’ils se rendent compte que c’est Lui.

Dans le deuxième livre de Luc, les Actes des Apôtres, les premiers chrétiens sont appelés « adeptes de la Voie ».La foi en Jésus-Christ les met en mouvement. Ils deviennent les « gens de la Voie ». Soit dit en passant, un théologien néerlandais note que les croyants d’aujourd’hui semblent être davantage « les gens de la chaise ». Il veut dire, bien sûr, que nous devons être en route, sortir dans les rues et proclamer la Bonne Nouvelle.

Celui qui part en pèlerinage devient littéralement un homme de la route. Mais pourquoi les gens vont-ils en pèlerinage ? L’été passé, j’ai pris la route à pied avec quinze autres personnes, vers la basilique de Montaigu (Scherpenheuvel, en Brabant flamand). Au cours d’un tel voyage, on s’abandonne à la route. Il faut se lever très tôt – à cinq heures du matin, les rues de mon village étaient encore sombres lorsque nous commencions à marcher.

À vrai dire, pour faire 30 kilomètres, il est beaucoup plus confortable de prendre la voiture. Les premiers kilomètres à pied se déroulent sans problème mais par la suite, la fatigue se fait sentir, puis la faim et surtout la soif. Quelqu’un dans le groupe n’arrête pas de bavarder ; un autre s’énerve parce qu’il veut prier en silence. Et à midi, le soleil brûle sans pitié…

NOTRE VIE EN MINIATURE

Alors pourquoi les gens entreprennent-ils un pèlerinage ? Au Moyen Âge, des fidèles ne se rendaient pas seulement en pèlerinage pour augmenter leur dévotion, écrit le philosophe français Frédéric Gros :
« Partir pouvait constituer aussi une expiation pour des fautes graves. Marcher devenait un châtiment… Simplement endurer de longs mois de la pluie, le froid, le vent devenait un calvaire. »

Un pèlerinage est notre vie en miniature. Sur le chemin d’Emmaüs, on pense parfois que tout est fini. Mais le Seigneur marche avec nous. Il reste à nos côtés.

Cela nous fait réfléchir, mais n’explique pas tout. Quand nous partons en pèlerinage, nous sommes comme les pèlerins d’Emmaüs de saint Luc. Les deux disciples qui viennent de Jérusalem sont découragés. Comme ils le disent à l’étranger qui les accompagne, ils avaient espéré que Jésus serait le grand rédempteur d’Israël. Mais voyez : Il a été condamné à mort et crucifié. Trois jours plus tard, tout espoir est perdu. S’Il est encore en vie, comme le prétendent certaines femmes, où est-Il ?

Un pèlerinage est notre vie en miniature. Sur le chemin d’Emmaüs, on pense parfois que tout est fini. Qu’il ne vaut plus la peine de croire en Lui. Mais le Seigneur marche avec nous. Il reste à nos côtés même lorsque nous ne Le reconnais-sons pas.

VOIR, SENTIR, HUMER DIEU

N’importe quel lieu peut être la destination d’un pèlerinage, et pourtant il y a certains lieux – des lieux saints – qui ont une attraction particulière pour les pèlerins catholiques: Lourdes, bien sûr, mais aussi le tombeau du saint apôtre Pierre à Rome, des endroits en Terre Sainte, etc.Nous sommes donc allés à Montaigu, et c’est un endroit qui, pour moi, est entouré de souvenirs de ma jeunesse.

Enfant, j’allais souvent avec mes grands-parents le dimanche chez ‘Ons Lievevrouwke’. Ce voyage s’est toujours déroulé selon le même scénario : d’abord brûler un cierge dans la basilique et dire un prière, puis passer aux échopes où grand-père m’achetait un sachet de bonbons ou un moulin multicolore, et nous terminions avec des crêpes ou une gaufre au café Saint-Joseph ou à L’œil du Christ.

Dieu est transcendant et dépasse notre imagination. Mais nous sommes des êtres humains, et nous voulons nous servir de nos sens : nous voulons voir, entendre, sentir, humer Dieu… Le palper.

Des pèlerins arrivant à Montaigu

Vous connaissez sans doute l’expression « le cœur est près de l’estomac ». Un de mes amis, hollandais et protestant, a été choqué quand je l’ai emmené à Montaigu. Il me disait : « Chez vous, les catholiques, non seulement l’amour, mais aussi la foi passent par l’estomac ! »

Pourquoi est-ce que je vous dis cela ? Le cardinal Danneels disait qu’à Montaigu et à d’autres endroits, la foi passe par « les mains et les pieds ». Il y a du vrai. L’image que nous nous faisons du Seigneur n’est
« que » image. En vérité Il est transcendant et dépasse notre imagination. Mais nous sommes des êtres humains, et nous voulons nous servir de nos sens : nous voulons voir, entendre, sentir, humer Dieu… Le palper.

ELLE VOUS ÉCOUTE

C’est pourquoi nous cherchons des lieux où nous pensons Le trouver : des lieux saints, comme Compostelle ou Vézelay, où tant de gens sont allés ayant des attentes semblable aux nôtres ; des lieux saints où on peut faire l’expérience d’une guérison moyennant la foi – alors nous parlons de « miracles ».

Je pense surtout aux lieux de pèlerinage marial. Lorsque, enfant, je rentrais de l’école à la maison mal à l’aise (un mauvais test, une bagarre avec un camarade de classe…) – cela se passait toujours comme ça : je jetais mon sac à dos dans un coin, je m’asseyais à la table de la cuisine et maman s’occupait de moi. Pas besoin de paroles, un seul regard lui suffisait pour comprendre avec quoi je luttais.

N’est-ce pas la même chose dans un lieu de pèlerinage marial ? Vous vous sentez chez vous. Vous pouvez laisser là votre sac à dos avec tous vos soucis. Marie, la mère de Jésus et notre mère, vous écoute. Vous n’avez même pas besoin de dire quoi que ce soit. Comme quelqu’un le fait remarquer : « La dévotion mariale se situe au niveau du cœur. À ce niveau, peu de mots sont nécessaires, c’est le silence. »

C’est peut-être pour cela qu’il fait toujours calme du côté des bougies devant la basilique de Montaigu ou à la chapelle des apparitions à Banneux, même quand il y a beaucoup de monde – comme chaque année au mois de mai, quand 6000 (!) catholiques vietnamiens affluent de toute l’Europe vers Banneux, le lieu de naissance de Mariette Béco et l’endroit des apparitions de Marie en 1933.

DE SANCTUAIRE À SANCTUAIRE

Enfin, je voudrais partager avec vous mes trois principaux lieux de pèlerinage en Belgique. En troisième position se trouve Moresnet-Chapelle, au nord-est de la province de Liège. Depuis 1750, dans ce hameau de la commune de Plombières, on vénère une statue miraculeuse de la Sainte Vierge, et au début du 20ème siècle, les pères franciscains y ont construit un impressionnant chemin de croix près de la chapelle de Notre-Dame.

Le long d’un sentier légèrement en pente, bordé de centaines de fleurs et d’arbustes, dans des grottes en pierre naturelle sont représentées les stations de la Via Dolorosa. Je vais régulièrement à Moresnet en faisant un crochet par Aix-la-Chapelle avec sa cathédrale dédiée à la Vierge. D’ailleurs, chaque semaine, un groupe de croyants d’Aix-la-Chapelle traverse la forêt jusqu’à Notre-Dame de Moresnet.

Le long d’un sentier légèrement en pente, bordé de centaines de fleurs et d’arbustes, dans des grottes en pierre naturelle sont représentées les stations de la Via Dolorosa.

En deuxième lieu il y a l’ermitage de Bolderberg, en Campine limbourgeoise. C’est l’un des derniers ermitages habités de notre pays. L’ermitage – en fait une chapelle de Lorette avec un petit ermitage à côté – se trouve à quelques minutes du circuit de Formule 1 à Zolder, et pourtant il y fait toujours calme. Si vous voulez visiter la chapelle, il faut faire de la marche. Vous devrez laisser la voiture dans le village de Bolderberg, puis suivre un chemin de sable jusqu’au au sommet de la colline. Devant l’ermitage se trouve un crucifix où les pèlerins déposent une pierre rapportée de chez eux ou ra-massée en cours de route.

Et puis en premier lieu… il s’agit de plusieurs lieux : nos églises dominicales. J’entreprends tous les dimanches un pèlerinage de 4 kilomètres –généralement en voiture, c’est vrai, mais il y a les pavés qui évoquent un cheminement… – jusqu’à Saint-Remy-Geest. C’est mon lieu de pèlerinage préféré parce que j’y trouve une église accueillante, une petite assemblée croyante et priante, et donc une trace de Dieu.

Saint-Remy-Geest avec son église du XVIIIème

Glenn Geeraerts

Cet article est paru dans l’édition de février de notre revue Marie, médiatrice et reine. Vous voulez lire plus? Prenez un abonnement d’essai gratuit!

« Si la foi est vivante, le reste suivra »

Un moine qui devient évêque, cela n’arrive pas souvent. Lorsque Lode Van Hecke, le père abbé d’Orval, fut nommé évêque de Gand en novembre 2019, les caméras de télévision se sont dirigées sur lui. Lui-même resta calme en apparence, bien qu’il fût inquiet : les adieux de ses frères dans l’abbaye ne seraient-ils pas trop difficiles pour lui ? Mais bientôt un autre problème surgit qui exigea toute l’attention du nouvel évêque. Quelques semaines seulement après l’ordination de Mgr Van Hecke, voilà que le confinement dû àu covid paralysa la vie publique : « Pour de nombreux croyants, la crise de du covid s’est avérée être un moment de vérité. »

Lorsque Lode Van Hecke fut nommé évêque de Gand, le cardinal De Kesel lui conseilla de préserver « son âme de moine ». Il faisait allusion à la vie de l’Abbé Lode Van Hecke pendant 45 ans, moine dans l’abbaye trappiste d’Orval – à l’exception de quelques déplacements à Rome et en Amérique latine. Le moine est-il différent du prêtre moyen ?
Une question difficile, selon Mgr Lode. « Peut-être que mes collaborateurs savent mieux répondre que moi à cela : un moine en tant qu’évêque. Soi-même on n’y fait pas attention. Après tout, ce n’est pas comme si je n’étais que moine. Je suis juste moi-même. »
« Il y a beaucoup de clichés sur la vie monastique, admet-il. On croit, par exemple, que dans une abbaye on est complètement coupé du monde ! Quelqu’un m’a dit qu’il reconnaissait en moi le moine quand je présidais la célébration eucharistique. Il a remarqué que j’attache de l’importance aux moments de silence pendant la célébration. »

COQUILLAGES SUR LA PLAGE

« L’Église fait face à de grands défis. Ma réaction spontanée est souvent de dire aux gens : revenons à l’essentiel au lieu de mettre beaucoup d’énergie dans toutes sortes de structures qui ne fonctionnent plus. C’est peut-être une réaction typique pour un frère ou un père ? » demande Mgr Lode. « À l’âge de 26 ans, j’ai choisi la vie monastique. Quand je suis entré à Orval, j’ai tout laissé derrière moi pour me consacrer à une seule cause : la foi de l’Évangile. Et cela a entraîné que je sois souvent absent de toutes ces discussions sur l’avenir de l’Église.
« Voyez, nous sommes tous fascinés par les coquillages sur la plage. Il y en a même certains qui en construisent toute une collection, et c’est assez fascinant. Mais il n’y a plus de vie dans ces coquilles, elles ne sont rien de plus que des squelettes. Le mollusque lui-même, la créature vivante, en a disparu. Au cours des dernières décennies, nous nous sommes grattés la tête sur les moyens d’amener plus de gens dans l’Église. Alors que : si la foi elle-même est vivante, le reste viendra naturellement. »

Défis : un mot qui revient plusieurs fois dans notre conversation, surtout quand il s’agit de l’avenir de l’Église et de la religion dans nos ré-gions. La période de crise dans laquelle se trouve l’Église rappelle à Mgr Lode l’exil du peuple de Dieu, comme on peut le lire dans l’Ancien Testament : « Les Juifs ont tout perdu. Les choses mêmes auxquelles ils avaient attaché le plus d’importance – leur pays, la royauté, le temple – n’existaient plus. En raison de leur pérégrination à travers le désert, ils ont été forcés de revenir à l’essentiel : la foi de la Bible. »

À UNE TABLE AVEC UN MASQUE

En parlant de crise… Lorsque Lode Van Hecke a été ordonné évêque le 23 février 2020, il avait déjà réfléchi à son engagement. « Nous avions un beau plan », se rappelle-t-il. « Durant dix semaines, je visiterais tous les doyennés de mon diocèse. Et puis la pandémie du coronavirus a éclaté. Parce que personne ne savait combien de temps durerait le confinement, nous avons changé nos plans. J’ai pris beaucoup de temps pour écouter. Tout cela est devenu beaucoup plus personnel et profond. »
« Pendant un certain temps, même célébrer l’Eucharistie n’était plus possible. J’étais un nouveau venu à Gand et, malgré toutes les limitations, je voulais toujours savoir quels étaient les besoins des habitants de notre diocèse. Ainsi, tous les samedis après-midi, en portant un masque je me suis assis à une table dans l’église, attendant ceux qui se présenteraient. Les gens sont venus sponta-nément s’asseoir en face de moi. »


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Ouvert à l’avenir

À la fin de ce mois, le 27 novembre, commence l’Avent. Comment pouvons-nous vivre de manière significative cette « période forte » ? Nous l’avons demandé à Carine Devogelaere, sœur Annonciade d’Heverlee. «L’Avent est un moment pour pratiquer l’espérance », écrit-elle.

Quiconque est attentif aux informations d’aujourd’hui, que ce soit dans la presse écrite ou sur le petit écran, découvrira la misère et les souffrances du monde entier. Lorsqu’il s’agit de nous projeter vers l’avenir, nous li-sons et entendons presque exclusivement des scénarii apocalyptiques et l’annonce de catastrophes imminentes. Écologiquement, le monde est sur le point d’atteindre le moment de sa destruction. Politiquement, des choses étranges se produisent lors des élections démocratiques. Les guerres et la violence n’ont pas de fin.
Ce ne sont pas seulement les médias qui nous donnent des messages négatifs. Nous sommes également coupables de relever tout ce qui ne va pas et nous le projetons dans le futur. Les virus menacent notre santé et notre vie sociale. Nous voyons les réfugiés et les demandeurs d’asile comme un problème majeur. Le changement climatique menace notre prospérité. Pour les croyants, le fait que de nombreuses églises se vident est un sombre présage de la disparition de l’Église. Nous sommes tous devenus prophètes d’une seule vision : celle de notre chute et de la victoire du mal.

« C’EST DÉJÀ COMMENCÉ »

Cependant, celui ou celle qui lit les livres des prophètes dans la Bible devra toujours faire face à deux types de visions sur l’avenir. Côte à côte et parfois presque alternativement, les prophètes disent que tout va à la damnation mais aussi que Dieu apportera le salut et le bonheur. Parce que Dieu veut que les gens trouvent la vie. Par conséquent, dans les lectures liturgiques de l’Avent, nous entendons une sélection des visions pleines d’espoir et prometteuses de bonheur du prophète Isaïe. Cette sélection nous conduira à la naissance du Messie.
Isaïe dit : « Ne vous souvenez plus d’autrefois, ne songez plus aux choses passées. Voici que je vais faire du nouveau qui déjà paraît, ne l’apercevez-vous pas ? » (Is 43, 18-19). Et Jésus dit à ses disciples que le Royaume de Dieu est parmi eux. L’avenir que Dieu nous promet est visible presqu’à chaque page de la Bible. Son Royaume de justice et de paix est annoncé dans des textes explicites, tels que les visions des prophètes qui nous promettent le salut. Et dans les évangiles, Jésus montre, par sa façon d’agir, comment un autre monde est possible.

PRATIQUER L’ESPÉRANCE

Les gens ont besoin d’espérance. Ils aspirent à des mots et à des signes qui leur ouvrent un avenir. Comment se fait-il que ces signes semblent si faibles en nous et autour de nous ? Pourquoi n’atteignent-ils pas le domaine public ? À cause du manque de connaissance ou de notre naïveté ? En tant que croyants, nous sommes appelés à « rendre compte de l’espérance qui est en nous » (1 P 3, 15).
L’Avent est certainement un temps excellent pour pratiquer l’espérance. Chaque jour, prenons un moment pour nous arrêter et essayer de lire, entre les lignes de notre temps, les signes d’un avenir plein d’espérance. Les exemples des autres peuvent nous inspirer.
Dans le livre de la Genèse, nous lisons comment Abraham reçoit de Dieu la promesse d’une nombreuse descendance. Or, sa femme Sara est mé-nopausée depuis longtemps. Même lorsque tout espoir a disparu, « Abraham a continué à espérer et à croire qu’il deviendra le père de nombreuses nations, comme Dieu le lui avait promis : « Espérant contre toute espérance, il crut et devint ainsi le père d’une multitude de peuples » (Rm 4,18).

NE BAISSEZ PAS LES BRAS

Dans le livre de l’Exode, nous lisons comment les Israélites sont engagés dans un combat contre les Amalécites pendant que Moïse prie pour qu’ils puissent gagner la bataille. Tant qu’il lève les bras en prière, les Israélites gagnent. Mais c’est une attitude fatigante et le texte raconte : « Tant que Moïse tenait ses bras levés, Israël était le plus fort, quand il les laissait retomber, Amaleq avait l’avantage. » C’est pourquoi deux hommes devaient lui soutenir les bras (Ex 17, 11-13). Cette histoire montre comment les autres peuvent être un soutien pour continuer à espérer et à faire confiance. Ne dit-on pas que celui qui perd courage ou espoir baisse les bras ?
Dans l’Évangile de Luc, nous lisons comment Syméon, un homme âgé de Jérusalem, a vécu toute sa vie dans l’attente de la venue du Messie. Et un jour, le Saint-Esprit lui inspire d’aller au temple. Parce qu’il a appris à regarder les gens avec un regard plein d’espoir, il reconnaît le Sauveur du monde dans le petit enfant que Joseph et Marie apportent (Lc 2, 25-32).

AVEC ET COMME MARIE

Comme Syméon, Marie était une des Juives qui attendaient avec espérance le Messie. Chaque Avent, nous nous souvenons de la façon dont elle a vécu cette attente. Comme aucune autre, elle attendait avec impatience la naissance de Jésus, ‘Emmanuel, Dieu avec nous’. Elisabeth, sa parente, la loue joyeusement parce qu’elle a eu confiance en la réalisation de la promesse de Dieu. Alors Marie chante dans son Magnificat son espérance d’un monde nouveau (Lc 1, 46-55). Dans ce chant d’action de grâce, il devient visible combien Marie est consciente des abus qui existent dans le monde où elle vit. Les Romains occupent le pays. Il y a un fossé entre les riches et les pauvres. Beaucoup de gens ont faim. Mais Marie voit au-delà de tout ce négatif. Elle exprime son espérance et sa confiance en Dieu qui accomplira sa promesse d’un nouvel ordre mondial.
Les informations sur Marie sont rares dans les évangiles. Mais Luc décrit comment, à la naissance de Jésus et plus tard aussi quand elle le trouve dans le temple de Jérusalem, elle garde tout ce qu’elle vit dans son cœur. Là, elle nourrit son espérance, même si cela n’a pas dû être facile. Après la mort de Jésus, nous retrouvons Marie avec les apôtres qui attendent la venue de l’Esprit Saint. Marie reste avec eux comme une présence pleine d’espoir. Car elle avait fait l’expérience de la puissance de l’Esprit de Dieu.

À Noël, nous célébrons comment Dieu vient à nous, comment Il nous ouvre un avenir. Son incarnation et plus encore sa résurrection sont les signes convaincants qu’Il tient sa promesse. La vision de l’avenir qu’Il a ouverte peut alors nous inspirer à vivre avec espérance et confiance dans nos cœurs. Nous remercions Dieu pour tous ceux qui gardent cette espérance éveillée en eux. Qu’ils nous enseignent à voir à quel point est grande l’espérance à laquelle nous sommes appelés.

Sœur Carine Devogelaere

Cet article a été publié dans notre revue Marie, médiatrice et reine de novembre 2022.

Marie, souffrante par amour

par Père Jos Van den Bergh, s.m.m.

Comment gérer la souffrance de quelqu’un que vous connaissez bien ?
En ce moment, un de mes proches souffre de plus en plus de « brouillard dans sa tête », ce n’est pour moi plus une question sans engagement. Eh bien, que faites-vous lorsque vous voyez un ami ou un membre de votre famille souffrir ?

Cela va vous arriver : vous êtes emmené au service des urgences parce que quelque chose cloche. Mais vous ne savez pas ce qui se passe. Plusieurs examens se succèdent. Le cerveau bourdonne, comme si une guêpe s’était trompée de direction et continue de tourner dans la tête. Et vous ne pouvez plus penser clairement. On vous demande toutes sortes de choses, mais les réponses ne viennent pas. Vous dites n’importe quoi. Vous vous rendez compte au fond de vous que vous donnez l’impression de ne plus être capable de bien réagir. Il y a un court-circuit quelque part dans la tête…

Un combat intérieur
Cela arrive à tant de personnes qui souffrent d’une forme de déficience cognitive. Et les gens sont vite là pour juger, car un trouble cognitif vous dirige rapidement vers la psychiatrie. Vous, vous menez un combat intérieur, parce que vous ne voulez pas être considéré ainsi. Le terme psychiatrie est encore aujourd’hui perçu négativement et on vous place rapidement dans la catégorie des personnes qui ne peuvent plus se prendre en charge, qui doivent être internées, car elles ne sont plus adaptées à la société ou vice versa.

Cela arrive à tant de personnes. Tant d’hommes et de femmes en font l’expérience, de sorte que beaucoup de personnes y sont impliquées, elles n’ont pas de choix. Lorsque quelqu’un ne se souvient plus du nom d’un être cher ou oublie facilement qu’il a un rendez-vous, il commence rapidement à penser : est-ce que je souffre de la maladie d’Alzheimer ? Ou ai-je les premiers signes de démence ? Et puis la réponse est : peut-être oui, peut-être pas.

L’impuissance ?
On commence à se poser de plus en plus la question du fonctionnement de son cerveau. Le souvenir de personnes qui ne sont plus autonomes ou d’autres qui semblent être absentes alors qu’elles sont assises à côté de vous, vous vient à l’esprit. Peut-être des cas pires encore. Y a-t-il une souffrance plus grande que de tourner en rond dans la tête, réalisant que cela ne va plus ? Vous êtes en train de bourdonner, pensée après pensée dans votre esprit.

Comment réagir lorsqu’un enfant ou un partenaire se recroqueville de douleur ? Que faites-vous lorsque les médecins n’ont pas de solution et que vous-même êtes impuissants ?

Je m’imagine que c’est terrible, même s’il ne s’agit pas de mon cas personnel. Je décris la situation parce que j’y suis confronté. Ce sont de grandes souffrances et comment réagit-on ? Comment les gérer? Comment gérer la mort soudaine d’un frère ou d’une soeur ? Que faire lorsqu’à l’hôpital, après avoir fait des examens, on vous annonce une maladie grave ? Comment réagir lorsqu’un enfant ou un partenaire se recroqueville de douleur ? Que faites-vous lorsque les médecins n’ont pas de solution et que vous-même êtes impuissants ?

Comment Marie a souffert
Pour autant que nous le sachions, le coeur de Marie, la mère de Jésus, a été blessé à plusieurs reprises. Par rapport à elle, les évangélistes citent des situations concrètes semblables à ce qui peut nous arriver à tous. On vient lui dire que l’on se pose des questions par rapport à son fils à l’oeuvre. On dit même qu’Il commence à devenir fou, qu’Il prêche toutes sortes de choses qui font plaisir à beaucoup, mais qui font peur à d’autres.

Il y a de l’agitation à Capharnaüm, où Il se trouve actuellement avec des amis. Marie s’y rend au plus vite car elle veut voir ce qui se passe avec son fils. C’est un si bon garçon, Il a trouvé des amis avec qui il circule en faisant le bien. C’est au moins ce qu’on dit, mais apparemment tout le monde ne le comprend pas. Pourtant, Il ne fait que du bien, et Il a le don de la parole.

De fait, certains sont très mal à l’aise. À cause de son succès, ils perdent l’autorité sur le peuple. Ils préfèrent qu’Il parte au lieu d’arriver. Ils n’aiment pas écouter son fils qui a appris de son père comment se comporter correctement et être honnête, comment interpréter les choses et les faire comprendre aux autres. À la maison, Il écoutait attentivement quand nous parlions de l’histoire de notre peuple.

Persister dans l’amour
Comme vous pouvez le voir, j’essaie de faire preuve d’empathie et d’entrer en contact avec ce que vit une mère qui s’appelle Marie, mais qui traverse ce que vivent de nombreux mères et pères. Qu’est-ce que cela signifie pour nous lorsqu’elle agit et ne reste pas inactive lorsqu’on lui parle de son fils ? Elle part, parce qu’elle veut savoir et voir de ses propres yeux.

Ce que j’apprends de cette mère, Marie, c’est sa persévérance, sa persistance dans l’amour.

Elle veut le serrer dans ses bras et sentir que malgré tout Il va bien. Elle obtient une réponse très difficile et quelque peu brutale de Lui-même lorsqu’Il demande à haute voix : « Qui est ma mère ? » Mais elle l’ignore, parce qu’elle sait ce qu’Il veut dire. Elle réalise aussi que les circonstances ne sont pas faciles pour Lui, et qu’Il doit être un peu fatigué.

Ce que j’apprends de cette mère, Marie, c’est sa persévérance, sa persistance dans l’amour. Quoi qu’il arrive, elle continuera à aimer son fils. Parce qu’elle Le connaît et Lui fait confiance, parce qu’elle arrive à relier ses paroles et ses actes. D’après elle, on ne Le comprend pas. Elle compatit, Il est le sang de son sang. Depuis des années, elle sait qu’il y a bien plus que ce qui est visible aujourd’hui. Elle sent qu’Il fera de grandes choses, elle le savait depuis longtemps, déjà avant sa naissance.